Partant de sa conviction, le Grand Imam, le Professeur Ahmad Al-Tayeb, Cheikh d’Al-Azhar, croit dans l’importance d’étudier et de rechercher les questions contemporaines concernant la relation entre l’Islam et l’Occident, en particulier dans la construction de plus de ponts de communication avec les adeptes de différentes civilisations et cultures à travers le monde. Le fait de contribuer activement à tout ce qui profite aux gens et contribue au bien de l’humanité… Le Professeur Ahmad Al-Tayeb, Cheikh d’Al-Azhar, a tenu un forum international en coopération avec le Centre international Ganjavi (NGIC), sous le titre « L’Islam et l’Occident… Diversité et intégration », du 22 au 24 octobre 2018 au Caire, pour étudier et rechercher des questions des lectures contemporaines de la relation entre l’Islam et l’Occident. Puisque l’Islam n’est pas étranger à l’Occident, et ne représente non plus un ensemble de croyances étranges « importés en Occident », mais il constitue actuellement la deuxième religion en Europe. Elle est adoptée par un grand nombre de citoyens dans de nombreux pays en Occident.
Des éléments extrémistes et des terroristes ont réussi à semer le doute entre la majorité de la population et les musulmans vivant parmi eux. Cela était un objectif poursuivi par de nombreux groupes extrémistes en s’appuyant sur des opérations terroristes ou en adoptant des actes terroristes perpétrés par des personnes marginalisées ou mêmes des malades mentaux.
Les politiciens populistes ont exploité la peur de la population, en critiquant durement les questions d’immigration, de multiculturalisme et le chômage parce qu’ils cherchent à construire, pour eux-mêmes, une base solide de soutien indéfectible. Par conséquent, ils commencent à critiquer le pluralisme, qui était au cœur des valeurs européennes, et qui prévalaient dans la société européenne depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Subséquemment, ils présentent l’islam comme la religion de l’extrémisme et de fanatisme.
De plus, les régimes conservateurs dans un certain nombre de pays à majorité musulmane ont largement contribué à accroître le sentiment d’aliénation, en véhiculant un discours très éloigné des comportements ancrés dans la religion musulmane tolérante, dont témoigne l’histoire des musulmans au Moyen Age, de l’Andalousie à l’Inde et de l’Asie centrale à l’Afrique. Cela à travers une longue histoire qui s’approche de mille ans, coïncidant en grande partie avec l’âge des ténèbres en Europe.
Ce forum s’inscrivant dans le cadre de l’initiative Est et Ouest lancée par Al-Azhar et le Conseil des sages musulmans, il y a deux ans avec des partenaires mondiaux tels que : le Conseil œcuménique des Eglises, l’archidiocèse de Cantorbéry et l’Organisation Saint Egidio.
Le forum visait à transcender les stéréotypes et les idées préconçues concernant l’Islam, et à parvenir à une compréhension commune, basée sur une vision objective et des fondements scientifiques loin de la division accusatrice promue par certains médias pour lier l’extrémisme et le terrorisme à l’Islam pour promouvoir la coopération conjointe et la convergence des points de vue, et enfin pour consolider ce qui est témoigné par les trois révélations divines : « Judaïsme, Christianisme et Islam » comme un appel à se connaître, à renoncer à la violence et à affronter les idées erronées.
Le forum a abordé les questions contemporaines liées à la relation entre l’Islam et l’Europe. Le symposium comprend huit sessions, traitant de plusieurs axes dont les plus importants sont : « L’évolution de la relation entre l’Islam et l’Occident » et « La tension entre les musulmans et le reste des Européens … La citoyenneté est la solution », « Le nationalisme, la popularité et le statut de la religion », La démographie, l’idéologie, la migration et l’avenir », et « L’expérience suisse ».
Méthode du colloque
Le colloque s’est concentré sur le rassemblement d’oulémas célèbres spécialistes dans l’étude de relations entre l’Islam et l’Occident ainsi que des oulémas de l’Islam en Occident pour ouvrir la porte à la discussion et au dialogue avec des dirigeants d’Europe et d’ailleurs, dans le but de parvenir à des conclusions pratiques sur la manière de combles le fossé entre les Occidentaux et les musulmans en Occident. Loin des méthodes polémiques et accusatoires manipulées par les médias pour attacher l’extrémisme, la violence et le terrorisme à l’Islam.
Ce rassemblement comprenaient ceux qui avaient d’énormes talents et connaissances parmi les académiciens illustres. Le forum s’est appuyé sur la divulgation audacieuse de l’état des études et des recherches dans nos domaines de connaissances, et sur l’ouverture de fenêtres vers ce qui peut être fait mieux fait dans le domaine des études islamiques à travers plusieurs questions dont les principales étaient :
Premièrement : Les différentes méthodes de l’enseignement des études islamiques et les points de convergences et de divergences entre la méthodologie de la recherche sur ces études suivies dans les établissements d’enseignement supérieur occidentaux et ceux des pays à majorité musulmane. Comment trouver des dénominateurs communs entre les deux méthodes ?
Deuxièmement : l’émergence des livres numériques permet d’utiliser de nouvelles méthodes d’y aborder, y compris l’utilisation de l’analyse des mégadonnées, de l’apprentissage automatique et de la reconnaissance des formes, ainsi que d’autres méthodes plus récentes, qui se développent actuellement, ce qui nous permettra de tout utiliser, à partir du nombre de répétitions dans le temps pour préciser la priorité entre les différents ouvrages.
La codicologie a une grande place dans de nombreuses institutions occidentales, mais elle est encore émergente dans de nombreuses institutions orientales. Y a-t-il quelque chose qui puisse être faite, dans ce domaine de nouvelles technologies, pour faire avancer le domaine des études des sources importantes et sous-étudiées dans le monde musulman ? Cela ouvre-t-il un espace de coopération dans l’étude des relations entre savoir occidental et savoir islamique ? Pouvons-nous concevoir un programme pour une telle coopération ?
Troisièmement : A la lumière de la situation politique qui a
déstabilisé les relations entre musulmans et non-musulmans dans le monde, les érudits occidentaux devraient-ils participer aux institutions orientales en produisant un ou plusieurs manuels sur l’Islam et les musulmans (en anglais, français et arabe), qui peut servir de référence pour la jeunesse occidentale et arabes pareillement ?
Sur quelles autres prochaines étapes pouvons-nous nous mettre d’accord pour être en mesure de poursuivre le chemin ? Alors, cet événement unique va-il rester un événement achevé?
Un certain nombre d’anciens président et ministres, d’éminentes personnalités politiques internationales et académiques, ainsi qu’un certain nombre d’hommes, de dirigeants et de responsables de religions d’Orient et d’Occident ont participé au forum, notamment : l’ancien président de la République d’Albanie, M. Amin Gemayel, l’ancien président de la République libanaise, l’ancien premier ministre belge, et M. Amr Moussa/ l’ancien secrétaire général de la Ligue des pays arabes, et le vice-président de l’Association japonaise des études Kiyose.
كلمات الإمام كلمة فضيلة الإمام أ.د أحمد الطيب/ شيخ الأزهر في مؤتمر الإسلام والغرب تنوع وتكامل
Le Discours de Son Éminence, le grand Imam d'Al-Azhar au colloque international intitulé: l'islam et l'Occident, diversité et complémentarité
Au nom d'Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux
louange à Allah, que les prières et la paix soient sur notre maître, le messager d'Allah, sur sa famille, ses compagnons et ceux qui ont suivi sa guidée.
Chers savants distingués à la tribune!
Chers invités!
Honorable Audience !
Que la paix, la miséricorde et les bénédictions d'Allah soient sur vous.
Bienvenue en Égypte, croisée des civilisations, nourricière de la science et de la culture, bienvenue à la vallée du Nil, terres des pyramides et d'Al-Azhar Al-Sharif, le plus ancien des instituts scientifiques et l'ainé des universités.
Encore une fois, soyez le bienvenu en vous souhaitant le bon séjour. Merci à vous de la part d'Al-Azhar et de ses institutions pour avoir répondu honorablement à l'invitation de participer à ce colloque international qui fait partie de la rencontre de dialogue Orient-Occident. J’espère qu’il soit fructueux en discutant la relation entre l’islam et l’Occident, une discussion fondée sur la franchise qui tient compte des dures conditions de vie de nos peuples, ici à l’Orient, et qui a ainsi besoin des réflexions des sages et des stratégies émanant des sains d'esprit comme vous.
Mesdames et Messieurs!
J'ai longuement réfléchi au mot par lequel je devrais contribuer à ce colloque et je me suis trouvé dans une situation similaire à celle de celui qui se trouve contraint de parler sur un thème battu. En effet, on a beaucoup émis des déclarations et recommandations non négligeables ont été émises sur la question de l'appel au dialogue entre les civilisations, sur la nécessité de sauver notre monde contemporain des dangers des conflits, de la paix menacée, des guerres froides d'hier et des guerres enflammées d'aujourd'hui. En dépit de ces efforts louables des sages de l’Occident et de l’Orient, la route est toujours âpre et nécessite plus d’efforts. J'ai médité sur ce paradoxe absurde entre la réalité et ce que nous escomptons, et il m'a semblé que la raison en était l'existence des obstacles au dialogue. Se concentrer à y trouver des remèdes, à les diagnostiquer et à les traiter s’avère peut-être plus efficace et rend court ce long parcours. C'est dans cette perspective, que je veux prononcer mon discours à cette réunion, je le résumerai sous forme des méditations, des pensées, des réflexions et même des rêveries.
La première chose que je voudrais souligner - devant vous – c'est ma conviction que l’Orient: en tant que religions et civilisations n’a aucun problème avec l’Occident, que nous prenions l’Occident dans le sens chrétien représenté par ses principales institutions religieuses ou en tant que civilisation scientifique et matérielle. Ceci émane de l'histoire des civilisations orientales et de ses positions constantes relatives au respect de la religion et de la science quelle qu’en soit l’origine et quel qu’en soit le savant ou le croyant.
Je ne pense pas que cette question ait besoin d'une preuve ou d'une démonstration, l'émergence de la civilisation de l'Andalousie au cœur de l'Europe dans le passé, l'ouverture récente d'Al-Azhar à toutes les grandes institutions religieuses d'Europe et la grande réceptivité de ces institutions occidentales – sont des plus fortes preuves de la possibilité d’un rapprochement entre les sociétés musulmanes de l’Orient et les sociétés chrétiennes laïques à l'Occident, ce rapprochement a eu lieu dans le passé et il pourra avoir lieu dans l'avenir, il ne s'agit pas comme l'a dit le poète «Kepling»: «l'Orient est toujours l'Orient, pareillement pour l'Occident, et que par conséquent ces deux entités ne se rencontreront jamais».
Je me souviens des recherches récentes de certains Occidentaux préoccupés par la question du dialogue islamo-chrétien, où ils font référence à l’archétype andalou avec ses trois aspects culturels : judaïsme, christianisme et islamique, pour suivre la direction de ce modèle et pouvoir dessiner le processus de dialogue en cours et concevoir "un cadre théorique et pratique pour les règles et les objectifs de ce dialogue". Surtout après les efforts déployés par les occidentaux contemporains répondus par d'autres efforts venus de l'Orient pour faire avancer le processus de dialogue entre l'Islam et l'Occident dont les décisions de Vatican II (1962-1965), la visite du pape Paul VI dans certains pays arabes et la Déclaration des Nations-Unies adoptant l'Alliance des civilisations en 2004. De telles initiatives ont encouragé la tenue de conférences de dialogue international à l'Occident et à l'Orient, ainsi que la visite du Pape François en Égypte (en avril dernier), sa participation à l'ouverture de la Conférence mondiale d'Al-Azhar pour la paix, l'échange de visites entre Al Azhar et l'archevêque de Canterbury, le Conseil œcuménique des Églises à Genève, l’Église protestante en Allemagne. Ces spécialistes ont de la peine vis-à-vis de la "paix perdue" et étaient conscients des problèmes qui font obstacle aux efforts locaux et internationaux et de l’ampleur de la distance qui les sépare et les résultats limités qui déboucheront de ces réunions.
Ce qui confirme ma conviction qu'il n'y a pas de problème pour l'Orient ou l'Islam avec l'Occident, c'est la réalité que nous vivons, dans son adversité et sa prospérité, depuis que les portes des musulmans se sont ouvertes à l'Occident au cours des deux derniers siècles et jusqu'à aujourd'hui. Dès lors, les musulmans ont beaucoup emprunté de la civilisation occidentale dans leur vie théorique et pratique. Voici nos écoles et nos universités, voire les écoles étrangères pour nos enfants où ils parlent, malheureusement, l'anglais, le français et l'allemand mieux que l'arabe, langue de leurs mères et pères et de leur pays d'origine. Je dis : Ces établissements d'enseignement ont inculqué à nos enfants des matières scientifiques et littéraires, bien plus que ce qui apprennent les étudiants européens dans leurs universités occidentales. Voici l'université d'Al-Azhar, la seule université fière d'enseigner le patrimoine islamique aux côtés des programmes d'enseignement occidentaux modernes dans les facultés de médecine, d'ingénierie, de pharmacie, de sciences, d'agronomie et autre. Cette université dispose en son sein d’une faculté pour enseigner les langues étrangères et la littérature dans différents départements, où sont cités les noms de pionniers de la littérature occidentale avec leurs diverses écoles. Je vais même jusqu'à dire: les départements de la littérature Arabe dans nos universités enseignent à leurs étudiants arabes musulmans et non-musulmans, toutes les écoles critiques connues en Occident, ainsi que les sections de la philosophie enseignent à leurs étudiants toutes les écoles de la philosophie occidentale ..
J'irai encore plus loin pour dire que j'ai étudié la philosophie à la Faculté de la Théologie dans les années soixante du siècle dernier auprès des éminents cheikhs. Qui ont fait leurs études dans les universités d'Europe et obtenu leurs diplômes supérieurs de la part des professeurs européens. Ils nous ont inculqué le respect, la vénération et la reconnaissance des mérites de ces professeurs, en dépit de notre désaccord avec eux ». Cette tolérance que nos cheikhs ont veillé à nous inculquer n'est pas un réflexe de ce qu'ils ont appris dans les universités occidentales, mais plutôt l’effet de la philosophie de l'islam dans sa communication avec l'Autre: en l’influençant ou subissant son influence. Voici le philosophe musulman (Averroès) Ibn Rushd, connu des universités occidentales et dont le mérite est reconnu en Europe au moyen âge, nous livre un texte magnifique que je ne me lasse de répéter, portant sur la nécessité du raisonnement rationnel et la légitimité de l'ouverture mentale des musulmans à la culture des autres, sur l'obligation de tirer profit des efforts des prédécesseurs, dans toutes les sciences, y compris les sciences de la philosophie, qui est la science la plus dangereuse en ce qui concerne le credo. Averroès dit dans ce texte: "si nous trouvons chez ceux qui nous ont précédés une théorie de savoir nous devons examiner ce qu'ils ont dit et écrit à ce propos : ce qui était conforme à la vérité nous devons l'accepter, nous en réjouir et les remercier, et ce qui est contraire à la vérité, nous en prévenons et mettons en garde, puis nous les excusons .
Averroès ne dit pas cela pour se faire des compliments ou par complaisances à une personne, mais ceci révèle un fondement solide de l’islam dans la quête de la vérité, qui consiste à remercier celui qui la découvre et à excuser celui qui y échoue. C’est ce que nous apprenons par cœur du Prophète, que celui qui fournit des efforts et trouve la vérité sera doublement rétribué par Allah, une rétribution pour les difficultés de la recherche et une autre pour la découverte de la vérité, que celui qui fournit des efforts sans réussir a droit à une récompense, à savoir celle de la difficulté de la recherche. Ainsi, le chercheur compétant de la vérité est toujours dans la philosophie de l'islam : remercié ou excusé, je ne pense pas qu'il y ait une autre équation de la tolérance avec autrui plus que celle-là.
Quiconque parmi vous, aura bien voulu nous honorer en visitant nos prestigieuses facultés d'Al-Azhar, situées dans le vieux quartier d'Al-Azhar, verra un institut dont le but est d’enseigner à nos étudiants et les futurs cheikhs, des langues européennes et de préparer les brillants parmi eux à des études supérieures dans des universités européennes. Participent à la direction et la supervision de cet Institut: le centre culturel britannique, l'institut français et Institut allemand Goethe; sous l'égide du siège d'Azhar Al-Sharif.
Voilà donc les programmes scolaires d’Al-Azhar dans son originalité et son ouverture consciente sur la sagesse où elle se trouve. Ce sont ces programmes qui façonnent la raison azharite modérée dans sa réflexion et sa conduite et capable toujours à s’adapter à l’époque moderne avec toutes ses problématiques et réalités.
Une autre chose, dont on parle peu ou pas de tout et ayant trait à la relation entre l’Orient et l’Occident, c’est le fait que beaucoup d’aspects culturels et civilisationnels européens sont insérés actuellement dans la profondeur de notre culture orientale, dans de divers domaines politiques, éducatifs, sociaux et artistiques. En outre, la différence entre les deux cultures est presque restreinte à la religion, à la croyance et à toutes les autres valeurs et traditions historiques et culturelles qui s’y attachent et qui sont indispensables pour toute Nation ou communauté attachée à sa culture la protégeant des attaques, de la fonte et de l’extinction.
Mesdames et messieurs,
Vous êtes peut-être d’accord avec moi, après cette explication, qu’il y a une question qui se pose inévitablement à ce moment qui est : où est cet Islam renfermé sur soi-même, emprisonné dans son passé et dont les adeptes représentent un grave danger pour la civilisation de l’Occident et ses réalisations dans le domaine des sciences cosmologiques et humaines ?! Y-a-t-il un seul pays musulman qui possède une seule usine de celles qui fabriquent les armes de destruction massive, ou une seule source de force dissuasive, un pays qu’on peut dire qu’il terrorise les forces internationales qui jouissent – malheureusement – d’une liberté sans limites au point de dire ce qu’il veut et faire ce qu’il veut tout en montrant son gros bâton à tout ce qui les oppose ou ose les contester !!
J’ai peut-être raison ou non de penser que le problème réside dans ces forces internationales pleines d’orgueil tout en s’arrogeant le droit de dominer les autres et les exploiter pour réaliser des intérêts et avantages particuliers. Cette attitude découle du sentiment qu’elles représentent la civilisation la plus avancée et la plus pure et qu’elles ont le plein droit à dominer les autres peuples et à les commander..
C’est le même prétexte utilisé par l’ancienne colonisation pour justifier son assaut sur les destins des peuples et leurs richesses.
Quant à moi, honorables messieurs, je fais partie de ceux qui croient à l’interconnaissance des cultures, à leur complémentarité et à leur coopération. C’est ce que j’ai appris dans le Noble Coran dans lequel j’ai appris dès mon bas âge que « l’interconnaissance » est la loi qui gère les relations entre les nations et les peuples. C’est ce qui est mentionné dans le verset connu par les musulmans et les non musulmans en Orient et en Occident : « Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle, et Nous vous avons répartis en peuples et en tribus, pour que vous fassiez connaissance entre vous. En vérité́, le plus méritant d’entre vous auprès d’Allah est le plus pieux. Allah est Omniscient et Il Connaît parfaitement les vérités. » (Sourate Al-Ḥujurāt LIX, V. 13), c’est ce que m’a inculqué mes études du patrimoine rationnel des musulmans imprégné des cultures grecque et indienne ainsi que des philosophies religieuses du Moyen-Âge.
Nous n’avons jamais pensé que le XXe siècle, qui est celui du progrès de la civilisation siècle de chartes des droits de l’homme et de la paix internationale, aboutirait à l’émergence de théories et de doctrines qui ouvriraient la voie aux guerres et justifieraient le choc des civilisations. Nous avons beaucoup entendu de la théorie de la lutte des classes, qui s'est rapidement emportée avec le vent, de la théorie de la fin de l'histoire et celle du choc des civilisations de Huntington. Il s’agit des théories qui renvoient à des thèses purement racistes dont vient en tête la thèse de Max Weber sur le monde, le sociologue et économiste allemand (1864-1920) qui est mort il y a près d'un siècle, Ce savant a fondé sa théorie en affirmant que: « La comparaison de la civilisation occidentale avec d'autres civilisations humaines prouve la singularité de la civilisation occidentale, avec des caractéristiques uniques en son genre, quin’ont pas d'équivalent dans d’autres civilisations, et que les traits caractéristiques de la civilisation occidentale n'ont été connus d’aucune culture en dehors de l'Occident »
Puis vint le célèbre orientaliste britannique: Bernard Lewis, pour confirmer, dans son livre l’«Islam», qu'il était le premier à lancer l'idée du [choc des civilisations] en 1957, au lendemain de la nationalisation par l'Égypte du canal de Suez sous la direction du regretté Gamal Abdel Nasser. Le peuple égyptien fut l'objet de la guerre d'agression tripartite en 1956. ... Lewis est revenu à cette idée en 1990, en parlant du monde arabe et islamique et réaffirmant que le cas de l'Occident vis-à-vis de l'islam était un affrontement véritable et historique de civilisations, et que l'attaque menée contre cette religion et sa civilisation par l'occident – est comme il dit "Une réaction face à un vieil adversaire de notre héritage juif et chrétien". Et il poursuit: Le choc des civilisations est un aspect important des relations internationales modernes".
Mesdames et Messieurs!
Je ne veux pas que mes paroles soient comprises comme un blâme jeté sur l’Occident et sa civilisation, car en Orient, il existe également des lacunes et des aspects négatifs qui ont contribué à l’affirmation du phénomène de l’islamophobie qui s’est récemment répandu parmi les masses de l’Occident. L'une des plus graves de ces lacunes, c'est le silence suspect sur le terrorisme, qui a permis aux mouvements politiques armés de lier l'Islam à leurs crimes terroristes, de donner de noms religieux à leurs organisations, d'attirer par-là un grand nombre de jeûnes-gens dupés par cette apparence religieuse trompeuse au point de creuser dans l'esprit de la majorité des Européens et des Américains que la violence et l'islam sont de jumeaux, allaitant le même sein, inséparables l'un de l'autre.
Il en est ainsi jusqu'à devenir difficile d'expliquer la vérité à l'Occident et aux Occidentaux, que cette religion a été kidnappée pour commettre des crimes terroristes effrayants aux yeux de ses adeptes et de ses croyants, et que les musulmans, décrits comme violents et brutaux, sont les victimes de ce terrorisme noir. En effet, retracer les causes du terrorisme et rechercher ses raisons profondes ne réside pas ni en islam, ni dans les religions célestes.
La vraie raison de ces maux réside dans les systèmes mondiaux qui se servent des religions, des valeurs, des us et des coutumes en faveur des marchés des armes et des politiques de racisme haineux et de néocolonialisme.
Merci pour votre aimable attention.
Que la paix, la miséricorde et les bénédictions d'Allah soient sur vous.
12 Safar 1440 correspondant au 21 octobre 2018 au Centre des conférence d''Al-Azhar,
Alhmad Attayb, grand recteur d'Al-Azhar.