Certes, le savoir est digne d’être recherché. Elle est le premier devoir qu’envisagent les gens avisés et l’héritage des Prophètes : « Les Prophètes n’ont laissé comme héritage ni dinar ni dirham. Leur héritage est le savoir. » C’est aussi la clé de la porte du Paradis : « Quiconque emprunte un chemin par lequel il recherche une science Allah lui facilite par cela un chemin vers le paradis ».
C’est également le savoir qui protège la ’Ummah contre la déviation et l’égarement : « Allah n’enlève pas la science en l’arrachant après vous l’avoir donnée, mais Il l’enlève par la mort des savants avec leur science. Il ne restera plus que des ignorants. Lorsque les gens leur auront demandé des fatwas, ils répondront par leurs propres opinions. Ils, ainsi, seront égarés et égareront les gens. »
À ce sujet, Allah dit : « Allah élèvera en degrés ceux d’entre vous qui auront cru et ceux qui auront reçu le savoir. »(al-Mujādilah, la Plaideuse, V. 11).
Depuis mille ans, voire plus, l’Egypte, le seul pays situé au carrefour des deux grands continents : l’Afrique et l’Asie qui sont le berceau de toutes les civilisations humaines et de tous les messages divins, a été créé un phare qui guide, par leurs lumières, l’humanité tout entière, surtout les jeunes arabes et musulmans dans ces deux continents.
Al-Azhar n’est pas seulement un institut ou une université internationale qui est peut-être la plus ancienne dans l’histoire de l’humanité. Cette institution n’a cessé d’offrir ses services depuis des siècles jusqu’à présent. Dans son essence, al-Azhar est essentiellement une mission, une méthode et un discours intellectuel distinct.
En effet, al-Azhar assume la responsabilité en matière de la science et de la Daʻwa au sein de l’Islam qui clôt les messages divins adressés aux humains, un message qui appelle à la paix internationale, à l’égalité, à la justice, à la dignité humaine et à l’affranchissement des fardeaux qui pèsent sur l’humanité, un message qui croit à tous les messagers d’Allah et à tous Ses Livres. À ce propos, Allah, le Très Haut :
« Le Messager a cru en ce qu’on a fait descendre vers Lui venant de son Seigneur, et aussi les croyants : tous ont cru en Allah, en ses anges, à ses livres et en ses messagers ; (en disant) : “Nous ne faisons aucune distinction entre ses messagers”. Et ils ont dit : “Nous avons entendu et obéi. Seigneur, nous implorons Ton pardon. C’est à Toi que sera le retour”. » (Sourate al-Baqarah, la Vache, v.258).
Pour bien comprendre ce message, l’enseigner et y appeler, al-Azhar adopte la méthode des gens de la Sunna, Ahl al-Sunnah wa al-Jamā‘ah, figurée dans la pensée de l’Imam Abū al-Ḥasan al-’Ash‘ari, dans ses Maqālāt équitables et dans tous ses ouvrages qui ont frayé la voie de l’examen rationnel dans les deux ʼAṣlayn (disciplines fondamentales) avec profondeur, juste milieu et modération. Cette méthode se présente aussi dans l’adoption des fondements des grands Imams suivis par les jurisconsultes de la ’Ummah sans fanatisme ni exclusion.
En effet, Abū Ḥanīfah, Mālik, al-Shafi‘ī et Aḥmad sont d’éminents imams notables dont les noms se répercutent au sein de al-Azhar. On enseigne leurs propos et opinions dans ses classes et sous ses dômes dans un climat de pensée tolérante et de réflexion objective tout en cherchant sincèrement la preuve la plus probante qui répond aux besoins de la ’Ummah dans les circonstances renouvelées et dans les incidents survenus.
Comme sont splendides les propos d’Aḥmad Shawkī, le Prince des poètes sur al-Azhar en disant :
Il (Al-Azhar) s’éleva par ses classes guidant en faisant ainsi partie de la Pléiade alors qu’il est encore ancré sur la terre,
Ensuite, il se dirigea vers les cercles apparaissant alors comme les halos du ciel illuminant,
Or, nous croyons que al-Shafi‘ī, Mālik, Abū Ḥanīfah, et Ibn Ḥanbal sont alors si présents.
Ainsi, al-Azhar a adopté tout le long des siècles une méthodologie scientifique permettant à ses étudiants de mieux approfondir la Langue Arabe et son génie et d’étudier ensuite le Coran, la Sunna et les sciences qui les servent pour en déduire les dispositions légales en matière des croyances et des dispositions pratiques. Nous en citons les sciences de fondements de la religion, celles des fondements du Fiqh, les sciences du Coran et celles des Hadiths ainsi que les sciences du Fiqh des écoles juridiques et le Fiqh comparé.
De surcroît, les étudiants d’al-Azhar maîtrisent aussi les sciences qui les aident à mieux comprendre le présent, le passé de leur culture islamiques et ses différentes phases. Ils étudient également les sources de la culture humaine en général comme la philosophie orientale et occidentale et les littératures anciennes et contemporaines qui leur permettent de bien comprendre le passé et le présent, de prévoir le futur et de donner des fatwas dans les nouvelles circonstances et les incidents survenus selon une méthode scientifique et des fondements reconnus.
Si vous me posez une question sur le trait caractéristique de la méthodologie d’Al-Azhar en matière d’enseignement, je vous réponds ainsi :
Elle consiste à analyser profondément les textes des bases du patrimoine arabe et islamique que nous avons hérité au cours des quatorze siècles passés pour former chez eux en plus de la compétence linguistique une performance en sciences religieuses qui aident les diplômés intelligents de cet Institut à répondre aux besoins de la ’Ummah. Raison pour laquelle, Al-Azhar mérite d’être la référence fiable pour le monde musulman tout entier.
Grâce à Allah, j’ai eu de la chance de m’inscrire dans ce prestigieux institut, après une formation arabe et spirituelle au sein d’une famille de science et de religion par un père plein de tendresse qui m’a bien marquée par ses empreintes. Je sollicite Allah, le Très-Haut, de lui accorder de la meilleure récompense pour ce qu’il a offert à moi et à la science.
Ensuite, j’ai bien bénéficié de la direction d’éminents Oulémas parmi les Cheikhs d’al-Azhar qui ont réuni la science religieuse selon la méthode des grands imams, la sagesse musulmane comme l’a déjà initiée le grand philosophe arabe Ya’qūb al-Kindī et la voie initiatique par l’intermédiaire des maîtres soufis et pieux : al-Junayd al-Baghdādī, al-Ḥarith al-Muḥasibī, Abū al-Qāsim al-Qushayrī, Abū Ḥamid al-Ghazālī.
Il s’agit donc d’une fusion qui a caractérisé les milieux azharites depuis l’imam réformateur Ibn Daqīq al-ʻĪd, et le Cheikh de l’Islam Zakariyā al-’Ansārī, et l’auteur d’al-Fatḥ d’Ibn Ḥajar al-‘Asqalānī, et les imams Ḥasan al-‘Aṭṭār, ʻUleish, Muḥammad ʻAbduh, al-Marāghī, Muṣṭafā ‘Abd al-Rāziq, ʻAbd al-Ḥalīm Maḥmūd, Sulaymān Dunia, et d’autres encore…, qu’Allah leur fasse miséricorde.
Tels sont les fondements de la méthode du discours azharite qui se distingue par son juste milieu et sa modération entre les adeptes de la doctrine de Salafs (anciens) qui essayent d’éviter l’anthropomorphisme et les erreurs de l’interprétation (Ta’wīl) d’une part et les khalafs (successeurs) qui préfèrent s’appuyer sur la raison et adoptent l’interprétation conformément aux normes de la langue arabe et des textes de la législation musulmane d’autre part. Nous respectons ainsi ce qu’a dit l’imam de Dār al-Hijra, Médine, lorsqu’il dit : « al-Istiwāʼ est connu, le comment est inconnu, y croire en cela est une obligation, poser une question à ce sujet est une sorte d’innovation. »
Cette méthode se caractérise également par le juste milieu entre l’adoption du rigorisme ou le fanatisme pour une certaine doctrine en vue de comprendre le texte sacré d’une part et le laxisme scientifique ou le non-respect de fondement de la déduction et le fait d’opter ou non pour un avis juridique sans avoir des bases solides.
L’acceptation du discours du juste milieu, que prône al-Azhar aussi bien dans le monde musulman qu’ailleurs, est due à cet esprit qui réunit la pensée scientifique et l’esprit soufi et qui s’attache scrupuleusement au juste-milieu que j’ai déjà mentionné en matière de dogme, ʻaqīda, et d’actes. Ce discours reflète ainsi l’esprit islamique original qui domine le monde musulman, même s’il y a des voix marginales ici ou là.